La Loi Claeys-Leonetti du 2 février 2016 a institué un droit d'accès à la sédation profonde et continue jusqu'au décès (SPCJD) sous certaines conditions. En France, peu de données existent pour évaluer comment ce droit très récent s'installe sur le terrain. Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), dont les missions sont notamment la collecte de données sur les conditions de la fin de vie en France et le suivi des politiques publiques sur le sujet a mené une première enquête quantitative nationale rétrospective début 2018. Son objectif principal était d'apprécier combien de SPCJD avaient été demandées et/ou proposées globalement en France en 2017, soit la première année pleine d'exercice possible de la loi, ses décrets d'application ayant été promulgués en août 2016. Cette première enquête avait également pour objectif d'accompagner cette nouvelle disposition législative pour mieux la faire connaître sur le terrain. C'est pourquoi il avait été choisi de la mener le plus largement possible, auprès à la fois des hôpitaux, des HAD, des EHPAD et des médecins généralistes, ce qui a pu être fait grâce au soutien de l'Ordre des médecins.
Cette première enquête n'avait pas permis d'obtenir de données quantitatives fiables. Le taux de réponse avait été trop faible, les structures interrogées ayant du mal à se mobiliser. Elles avaient invoqué des biais de mémoire et des difficultés d'identification des sédations profondes et continue jusqu'au décès au sein des pratiques sédatives de fin de vie en général, particulièrement à l'hôpital. Pour autant, elle avait été très instructive au plan qualitatif, montrant par exemple que cette pratique dépasse largement le champ des soins palliatifs. Elle avait aussi mis en lumière le fait que le terme de « sédation profonde et continue jusqu'au décès » renvoie à des pratiques différentes d'une spécialité médicale à une autre, comme c'est le cas dans d'autres pays et qu'il convient si l'on veut se faire une idée plus précise de ce qui se passe réellement sur le terrain de se mettre d'accord au préalable sur ce que recouvrent les données que l'on recueille. Cette première édition a conduit le CNSPFV à modifier sa méthode en 2019. Nous avons choisi de nous concentrer sur un plus petit échantillon de structures, de cibler une période de recueil plus courte pour éviter les biais de mémoire (1 semaine donnée), de recourir à des enquêteurs locaux, travaillant au sein des sites de l'enquête et surtout de travailler en amont avec eux pour élaborer ensemble une grille de caractérisation commune des SPCJD que nous souhaitions identifier au sein des pratiques sédatives de fin de vie. Cette enquête s'est focalisée sur quelques établissements hospitaliers, lieux de décès le plus fréquent en France. En effet selon les données de l'INSEE de 2017, les décès surviennent à l'hôpital dans 54% des cas, à domicile dans 24%, en EHPAD dans 13% des cas, sur la voie et lieu public dans
1% des cas et autre pour 8% des cas.
[Début de l'article]
La partie de l'étude "Mourir d'un cancer en démocratie sanitaire" dont il est ici question (MOCADESA, EHESS/APHP) visait à mieux connaître l'abord de la fin de vie et de la mort pour les malades du cancer. L'enquête a consisté à rencontrer des patients qui se situaient à un ou deux mois de leur mort, selon qu'ils se trouvaient dans un service d'oncologie, qu'ils étaient hospitalisés à leur domicile ou bien dans un service de soins palliatifs.
[Extrait]