Après trente ans de pratique et d'évolution des soins palliatifs en France, des changements dans la pratique et dans l'encadrement des patients sont toujours nécessaire.
Le patient, médicalisé pour la pathologie qui l'amène à être pris en charge par la sphère médicale est confronté à une pratique technicisée. Il est régulièrement confronté à un rapport stigmatisant, une honte, qui finit par le caractériser en tant qu'individu.
L'auteur propose ici une reprise en contexte de la réflexion sur les pratiques palliatives et l'accompagnement spirituel du patient ainsi que de son environnment personnel : une réflexion qui nous conduit jusqu'à la terminologie anglo-saxonne de "spiritual care",..
L'auteur propose une réflexion en cinq temps. Il revient, d'abord sur la complexité de ce qui est à réfléchir en insistant sur la notion d'incertitude comme présupposé éthique de toute réflexion-décision. Puis, il considère la notion de souffrance pensée au coeur de l'expérience du corps et de la vie. Ceci lui permet d'envisager la notion de souffrance spirituelle comme lieu d'inscription herméneutique du vécu de la souffrance sollicitant une sédation. La prise en compte de cette dimension spirituelle remet ensuite les notions d'interdisciplinarité et de compétence pour répondre à une demande de sédation. Ceci permet, au terme de ce parcours réflexif, de situer la demande rituelle comme modalité intersubjective d'entrée en sédation.
[Adapté de l'Intro.]
Nous voudrions, dans cet article, partager notre réflexion relative aux mutations que connaissent de nos jours les équipes mobiles intrahospitalières de soins palliatifs en Wallonie (Belgique) et proposer quelques repères d’avenir face aux défis auxquels ces dernières se trouvent confrontées. Après avoir fait un état des lieux, nous proposons un changement de vision. La nomination palliative est une reconnaissance du passage, de la transition du curatif au palliatif. Cette notion de « passage », de « transition » est fondamentale. L’équipe mobile intrahospitalière a un rôle éducatif à jouer dans la réimplantation de la mort, dans les possibilités qu’on a de l’évoquer. Il s’agit de revenir à une dynamique apaisante de la nomination de la mort possible. C’est tout naturellement qu’il est nécessaire d’évoluer vers une représentation circulaire des soins au cœur desquels se trouvent et les soins curatifs et les soins palliatifs, avec une vision plus précoce des soins palliatifs. Nous terminons en pointant les objectifs et missions de l’équipe mobile intrahospitalière, à continuer ou à développer, en précisant ses mandats et en incitant l’institution hospitalière à lui accorder une reconnaissance.
Les nouvelles législations en matière de fin de vie que ce soit en France ou en Belgique placent les soignants en dehors de leurs repères habituels, dans ce que les auteurs nomment une expérience de la transgression. Ces derniers reviennent sur le vécu des équipes dans ce type de situations.
De quoi parle-t-on lorsque l'on parle de sédation ? Quelle souffrance sédater ? Quand poser un acte de sédation ? Autant de questions auxquelles l'auteur apporte sa réflexion. Parler concrètement de sédation relève de l'interrogation éthique, car derrière chaque décision de sédation se trouve une situation singulière.
BACKGROUND: Integrated palliative care is correlated with earlier end-of-life discussion and improved quality of life. Patients with haematological malignancies are far less likely to receive care from specialist palliative or hospice services compared to other cancers.
AIM: The main goal of this study was to determine hematologists' barriers to end-of-life discussions when potentially fatal hematological malignancies recur.
DESIGN: Qualitative grounded theory study using individual interviews.
SETTING/PARTICIPANTS: Hematologists (n = 10) from four hematology units were asked about their relationships with their patients and their attitudes toward prognosis and end-of-life discussions at the time of recurrence.
RESULTS: As long as there are potential treatments, hematologists fear that end-of-life discussions may undermine their relationship and the patient's trust. Because of their own representations, hematologists have great difficulty opening up to their patients' end-of-life wishes. When prognosis is uncertain, negative outcome, that is, death, is not fully anticipated. Persistent hope silences the threat of death.
CONCLUSION: This study reveals some of the barriers clinicians face in initiating early discussion about palliative care or patients' end-of-life care plan. These difficulties may explain why early palliative care is little integrated into the hematology care model.
Dans de nouvelles situations de construction du mourir, comme l’euthanasie et la sédation profonde en fin de vie, émerge, en Belgique, une requête de construction de sens qui se traduit en une demande d’un rite à poser avant l’acte médical de provoquer la mort ou d’annihiler la conscience. En effet, dans les pratiques belges, la demande d’euthanasie, lorsqu’elle est refusée, se voit souvent remplacée par une sédation ; ce qui n’est pas sans induire de la confusion sémantique et clinique. À quoi renvoie ultimement cette demande ? Peut-on mourir sans rites ? Ce sont des questions auxquelles cet article vise à répondre en trois temps : il sera d’abord question des significations du rite lorsqu’il se trouve sollicité avant un acte de sédation ou d’euthanasie (1) ; en un deuxième temps seront explorés les enjeux de la construction du sens dans le temps du mourir (2) ; en un troisième moment, on cherchera à comprendre un au-delà du rite, qui renverrait à l’horizon plus large de la temporalité construite, où des paroles inédites et des gestes personnels pourraient soutenir la construction du sens en situation de fin de vie.
De nos jours, les sociétés mandatent fortement la médecine, par des législations variées – sédation, euthanasie, aide médicale à mourir –, pour construire la fin de vie d'autrui à sa demande. L'éthique se trouve de plus en plus sollicitée dans les pratiques soignantes. Mais quelle éthique ? Une accumulation de principes ? Une éthique réduite à la seule normativité juridique, à un protocole ? S'efforçant de réfléchir à quoi se trouvent aujourd'hui confrontés les professionnels s'ils deviennent, dans les faits, les "gardiens" du sens de l'existence de celui, celle qui n'en peut plus, peut-on se contenter de la seule raison pour déployer la signification d'une action ? S'il importe de rendre compte en raison des motifs d'une décision, d'un acte, ces derniers s'inscrivent aussi dans un registre plus large, celui de la spiritualité.
C'est la voie qu'explore cet ouvrage : comment faire habiter ensemble l'éthique et la spiritualité pour penser la demande et les modalités de réponse à la construction contemporaine du mourir ?
[Résumé éditeur]
Objectif: Avoir eu une discussion précoce sur les souhaits du malade en fin de vie est associé à une amélioration de la prise en charge palliative des patients atteints de cancer. Pourtant, les professionnels de santé investissent très peu les directives anticipées. L’objectif principal de l’étude était de comprendre ce qui facilite ou limite une discussion autour de la fin de vie lors de la rechute d’une hémopathie maligne agressive, d’après les oncohématologues. L’objectif secondaire était d’en explorer les conséquences sur l’ouverture aux soins palliatifs en hématologie. Méthodologie: Cet article présente les résultats de dix entretiens semi-directifs individuels d’hématologues cliniciens francophones. L’analyse du verbatim a été effectuée selon une méthode de catégorisation par thématiques, issue de la théorie ancrée.
Résultats: Lors de la rechute, la possibilité d’une discussion autour de la fin de vie était limitée par la crainte de la perte de l’alliance thérapeutique. Les hématologues avaient du mal à s’ouvrir à la subjectivité du patient et à se positionner vis-à-vis de son cheminement dans un contexte thérapeutique. L’anticipation d’un pronostic péjoratif n’était pas exploitée en situation d’incertitude. Une communication centrée sur l’espoir était préférée à l’approche de la question de la mort, perçue comme une menace.
Conclusion: La prise en compte de la subjectivité des cliniciens et la complexité de la mise en place de discussions autour de la fin de vie nécessitent de reconsidérer la place et le rôle des directives anticipées, des récits de vie et de l’importance du tiers dans l’articulation précoce entre soins palliatifs et hématologie.
Introduction : La mise en place d'un séminaire d'éthique clinique intitulé "hématologie et soins palliatifs" a invité autour de la table acteurs de sciences humaines et sociales et cliniciens à réfléchir à l'articulation entre hématologie et soins palliatifs.
Méthodologie : Seize participants issus des sciences humaines et sociales et de la médecine palliative et hématologique se sont rencontrés durant 18 mois dans une démarche d'éthique clinique, autour de cas cliniques vécus et considérés comme complexes d'un point de vue clinique et éthique.
Résultats : La réflexion initiale issue de problématiques de soignants se basait sur des questions organisationnelles entre médecine palliative et hématologie. Elle s'est déplacée au cours du séminaire, invitant à un questionnement d'ordre identitaire sur deux types de médecine, dites curative ou palliative. L'attention à la subjectivité des cliniciens et l'apport des sciences humaines et sociales dans la réflexion ont proposé un nouveau paradigme de soin, basé sur l'attention au mouvement de vie du sujet malade.
Discussion : La méthodologie de l'éthique clinique a permis une action engagée des chercheurs en sciences humaines et sociales dans l'accompagnement de la réflexion des acteurs de terrain et, par là, dans l'élaboration de pistes de transformation des pratiques professionnelles en santé.
L'auteur mène une réflexion sur la spiritualité, notamment par une proposition de définition, ainsi que sur sa place. Il aborde ensuite la notion d'accord commun entre le patient et le professionnel et la spécificité du domicile (difficultés, opportunités, dimensions éthiques).
L'auteur s'interroge tout d'abord sur le statut initial de la maladie avec la notion d'événement : quelle est cette irruption de la maladie venant fragiliser l'esprit ? Il montre ensuite l'intérêt d'inscrire le parcours de soin dans une perspective spirituelle. Enfin il cherche à montrer en quoi la prise en charge du patient, relativement à son entourage, nous convie à une approche renouvelée du corps et du temps.
[Adapté d'un extrait de l'introduction]
Les auteurs développent leur réflexion en cinq étapes. Dans un premier temps, ils cernent le contenu du concept de transgression. Dans une deuxième partie, ils s'arrêtent plus particulièrement à une des propositions du rapport Sicard (18 décembre 2012) partiellement relayée dans le rapport du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) sur le débat public concernant la fin de vie (21 octobre 2014). Dans une troisième partie, ils insistent, au regard de la clinique et d'une éthique cherchant à respecter au mieux tous les protagonistes de l'action, sur l'importance de pouvoir nommer la dimension transgressive d'une action. Cela leur permet, au terme de ces réflexions, de considérer ce que pourrait revêtir une éthique de "l'acte de transgresser" avant d'ouvrir certaines questions en suspens.
La rencontre d'une personne proche de la mort représente, pour le soignant, une expérience toujours singulière dont une certaine pratique de la médecine risque d'induire une forclusion de valeurs essentielles et de conduire, dans un souci d'efficacité, à la seule dimension d'immédiateté. Face à la rencontre de la mort de l'autre, quel recul réflexif serait aujourd'hui possible pour le soignant ?
[Extrait de l'introduction]
Cet article reprend la conférence donnée par l'auteur lors du 24ème congrès annuel de soins palliatifs du Québec le 12 mai 2014. Dans son propos, l'auteur a "tenté de montrer en quoi, de manière bénéfique pour tous, la requête contemporaine d'autonomie du patient comme lieu expérimenté de la dignité du sujet souffrant peut nous déloger de nos repères habituels".
[Extrait conclusion de l'article]
La loi Leonetti propose un cadre législatif au processus décisionnel auprès des patients en fin de vie. L'application de cette loi varie selon les lieux d'exercice du soin. Un travail de recherche pluridisciplinaire, multicentrique, descriptif et réflexif a été mené pour étudier l'application de cette loi au sein de 3 unités de soins palliatifs. Les résultats mettent en évidence un écart entre les pratiques et le cadre légal. Pour autant les équipes ont mis en oeuvre des pratiques témoignant d'une créativité dans la construction du processus décisionnel rejoignant de la sorte la visée de collégialité promue par la loi.
La période de la fin de vie apparaîtra pour bon nombre comme la période où, à priori, il semble si peu réaliste de parler de capacité, de capacitation, comme si l'horizon de la personne en fin de vie devait s'apparenter à un seul "lâcher prise" qui ne pourrait être appréhendé qu'en termes de pure passivité. En ce sens, parler de capacité au terme de l'existence ne peut que renvoyer à un horizon de compréhension de cette période de la vie comme d'un temps de vie, d'expérience d'un sujet singulier telle qu'a pu la mettre en exergue la pratique des soins pallaitifs. C'est pourquoi les auteurs s'attachent à montrer comment les institutions ont la volonté d'acter le patient dans sa capacitation, dans un contexte social ouvert et/ou réellement capacitant. Ils soutiennent que l'un des enjeux de santé publique est de s'ouvrir, de soutenir et d'assumer la subjectivité du patient en fin de vie.
Après avoir défini la place et le rôle du rite dans le rapport à la maladie et à la mort, les auteurs, un à un, confrontent la fin de vie aux grandes religions : christianisme, islam, judaïsme et bouddhisme.
L'auteur reprend, dans un premier temps, les principaux points de l'alliance thérapeutique évoqués par Paul Ricoeur. Dans un deuxième temps, il les éclaire par certains éléments théologiques de la notion d'alliance. Ce double éclairage lui permet de saisir comment un certain rapport à la croyance, en son sens séculier, éclaire la dimension éthique de la relation de soins en termes de responsabilité conjointe de deux sujets rencontrés dans la totalité de ce qu'ils sont et de ce qu'ils vivent.